Une jeunesse résistante
(février 2011)

En 1942, les actes de sabotage contre l’occupant allemand se multiplient à Nantes. Trente-sept communistes seront fusillés à l’issue du « Procès des 42 ». Parmi eux de jeunes rezéens.

 

  1. Trente-sept résistants sont condamnés à mort pour terrorisme et fusillés au champ de tir du Bêle. Parmi eux : Maurice Lagathu, Félicien Thomazeau, Marcel Boissard et d’autres jeunes rezéens. Ils sont tous enterrés dans le carré des militaires du cimetière Saint-Paul. Marcel Thomazeau, le frère de Félicien, et Pierre Le Floch sont, eux, jugés à Rennes pour leur rôle politique, et déportés. Le premier reviendra des camps, et écrira ses mémoires. Le second tombera sous les balles d’un SS en Tchécoslovaquie le 29 avril 1945.

Souvent de jeunes ouvriers

Cette répression fait suite à une année 1942 très agitée. Les membres de l’Organisation spéciale (OS), le bras armé du parti communiste français (PCF), bravent tous les risques et conduisent une guérilla urbaine incessante, qui a peu d’équivalent en France. Sur les quatre petits groupes constitués en Loire-Inférieure (l’ancien nom du département), deux sont basés à Rezé, dirigés par Maurice Lagathu et Félicien Thomazeau, âgés de 22 ans. « Ces activistes sont souvent de jeunes ouvriers de la métallurgie. Ils ont adhéré au PCF à l’époque du Front populaire, habitent les mêmes quartiers et se connaissent tous, ce qui facilitera le travail de la police », explique l’historien Guy Haudebourg.

Le 14 décembre 1941, un groupe conduit par Maurice Lagathu fait sauter un camion allemand stationné rue Alsace-Lorraine. Des pylônes électriques et poteaux télégraphiques sont sabotés au Moulin-à-l’Huile et aux Trois-Moulins. Les rails de la ligne de chemin de fer Nantes-Pornic sont endommagés. Le 16 mai 1942 un attentat vise, sans succès, le colonel Poiron, un collaborationniste de Pont-Rousseau. Souvent « ces attaques se préparent lors de réunions clandestines dans les prairies de Sèvre, vers la Morinière », témoigne Michel Doisneau, adolescent durant la Seconde Guerre mondiale. Novices, la vingtaine de Francs-tireurs et partisans (FTP) actifs ont été formés aux techniques de la guérilla par des communistes espagnols, anciens de la Guerre d’Espagne venus dans la région comme travailleurs forcés.

Six des huit fusillés rezéens

(Manquent Albert Brégeon et Maurice Jouaud)

Maurice Lagathu
Marcel Boissard
Henri Adam
Georges Barbeau
Félicien Thomazeau
André Guinoizeau

Une cache à Trentemoult

Article extrait du journal Le Phare de la Loire, 16 janvier 1943. (Archives municipales)

D’autres jouent un rôle en coulisses. Marcel Boissard, qui habite Trentemoult, cache chez lui de nombreux camarades, comme le jeune André Rouault, 17 ans, et le capitaine républicain espagnol Alfredo Gomez Ollero. « En cas de souci, ma mère devait dire qu’elle le croyait basque », rapporte Gilbert Boissard, le fils de Marcel. Autre Rezéen, Pierre Le Floch avait des responsabilités politiques dans le Sud-Loire. « Il était chargé de recruter et de récupérer de l’argent pour les familles des gens arrêtés », précise son fils, Guy.

En juin 1942, les Allemands et Vichy décident de mettre fin à ce harcèlement. Dépêché à Nantes, le SPAC (Service de police anticommuniste) traque les résistants. 143 communistes sont arrêtés durant l’été 1942, beaucoup sont torturés au commissariat de la rue Garde-Dieu. Pour marquer les esprits, les Allemands mettent en scène au palais de justice de Nantes, du 15 au 28 janvier 1943, le « Procès des 42 ». Avec trente-sept condamnations à mort et cinq déportations, ce procès du « terrorisme » sera l’un plus des terribles de cette période.

Guy Le Floch, fils de Pierre ; Michel Doisneau, président de l’association des déportés, internés, résistants et patriotes ; Gilbert Boissard, fils de Marcel.

Bibliographie

Les Fusillés rezéens, procès des 42, Michel Doisneau
La répression anticommuniste – Loire-Inférieure 1939-1944, Dominique Bloyet et Jean-Pierre Sauvage, Geste éditions
De la Guerre d’Espagne… à la résistance, Carlos Fernandez