Edmond Prud’homme, soixante années d’amicale

Né en 1934 aux Ponts-de-Cé, Edmond Prud’homme est amicaliste au centre d’éducation populaire-amicale laïque (Cepal) depuis son arrivée à Rezé, en 1960. Il habite, par hasard mais non sans satisfaction, la maison de Jean-Baptiste Daviais, « un bon, un vrai laïc ». Pour lui, laïcité rime d’abord avec liberté et générosité.

Pourquoi et comment êtes-vous devenu amicaliste ?

J’étais menuisier, j’avais des copains qui faisaient partie de l’amicale et m’y ont entraîné. J’avais envie de me rendre utile, de participer à la vie du quartier. Mes enfants étaient scolarisés à l’époque. On préparait la kermesse, on soutenait les classes de mer, de montagne… Quand je suis arrivé, le bâtiment était déjà construit, j’ai aidé pour les finitions.

Que représente la laïcité pour vous ?

La liberté ! C’est pouvoir lire ce qu’on veut, dire et écrire ce qu’on pense. C’est vivre en aidant ses voisins et sans les déranger. La situation de confinement me rappelle la guerre, avec les restrictions de circulation qu’elle imposait. Et l’actualité m’inquiète : la laïcité, c’est aussi avoir le droit de grève, la liberté de réclamer quelque chose sans être brutalisé par des CRS…. La laïcité, c’est le contraire de l’individualisme qui se développe beaucoup trop. C’est vivre ensemble et partager, à tout âge et d’où qu’on vienne.

Comment faites-vous vivre ce concept dans votre quotidien ?

Je participe toujours aux actions de l’amicale, je donne un coup de main quand il y a besoin. L’amicale aide toujours pour la kermesse, même si maintenant elle a lieu à l’école Plancher : on s’occupe des repas, du bar… Le lundi après-midi, on accompagne les gamins de l’école à la salle de sport. Certains font de la lecture aux petits, du soutien scolaire…

C’est une occasion de transmettre vos valeurs ?

Oui, on fait comprendre aux enfants qu’il faut aimer son prochain, sans rien de religieux ! Et l’importance de la politesse, du respect des anciens. Le rugby, que j’ai longtemps pratiqué, porte ces valeurs. On respecte l’adversaire. Je fais toujours partie du bureau du club.

La laïcité vous semble-t-elle toujours bien vivante ?

Ce n’est plus comme dans le temps, on ne trouve pas le même investissement. Les jeunes ont d’autres loisirs, ils travaillent. Autrefois, on n’avait pas de voiture, on se retrouvait dans le pré des Roquios. Dans le village, on sortait, on causait dans la rue. On a du mal à trouver de la relève. Les gens sont pressés, n’ont pas le temps. C’est difficile de les faire bouger, même si on essaie d’aller à leur rencontre. Quand ils ne travaillent pas, ils partent au bord de la mer ou regardent la télé… Nous, les activités de l’amicale nous occupaient, nous enrichissaient. Il y a quelques années encore, on était 700-800 dans l’amicale. Aujourd’hui, une centaine…

Que vous apporte votre activité d’amicaliste ?

Beaucoup de bonheur ! Avec le sentiment d’être utile, et la rencontre de gens différents, des échanges, des discussions. On n’est pas toujours d’accord…  Parfois, il y a de l’ambiance ! C’est ce qui est intéressant.

Vous avez toujours la foi, l’envie de continuer ?

Oh, encore une trentaine d’années et puis on verra ! (rire) J’ai réussi à mettre ma fille dans l’amicale. Mes trois garçons, non. Nos enfants ne prennent pas assez la relève. Mais, quand on raconte nos souvenirs, ils nous écoutent, ils sont fiers de ce qu’on a fait…