Créés à Talensac, les abattoirs de la Ville de Nantes se sont implantés à Rezé en 1933. D’abord à Pont-Rousseau, puis sur la route de Pornic, où ils fermèrent définitivement leurs portes en 1995.
Les premiers abattoirs de la Ville de Nantes s’installent à Talensac en 1829. L’urbanisation du quartier et les nuisances générées posent assez vite la question de leur transfert en dehors de la ville. Un premier projet est présenté à la mairie de Rezé en 1879 ; il n’aboutit pas. Un second pousse les élus nantais et rezéens à constituer en 1919 un syndicat intercommunal pour la construction et le fonctionnement d’un outil commun sur Pont-Rousseau. Mais des divergences opposent la Ville de Nantes, qui tient à cet équipement, à celle de Rezé, inquiète par son coût. Au final le syndicat intercommunal est dissout en 1932 et le territoire prévu pour accueillir l’abattoir annexé à Nantes. Le 16 octobre 1933 l’abattoir de Talensac est transféré sur le site actuel des Nouvelles Cliniques nantaises.
Un monde haut en couleur
Natif de Pont-Rousseau, Robert Boudaud a fréquenté ces abattoirs pendant une trentaine d’années. Son père, boucher rue Félix Faure, l’emmenait avec lui acheter bovins et veaux vivants. Il a pris sa suite en 1959. « C’était très convivial, tout le monde se connaissait », se rappelle-t-il. Dans une ambiance « brut de décoffrage », des personnages hauts en couleur animent les lieux ; le tutoiement et l’usage du prénom sont de rigueur. Les affaires se poursuivent au café du Petit Coin, à l’entrée du site, à la cantine des abattoirs ou dans les nombreux cafés de Pont-Rousseau. Un simple chiffre donne l’ampleur de l’activité des abattoirs nantais : rien qu’à Rezé « on comptait 21 bouchers dont 6 dans notre rue », se remémore Robert Boudaud. Des activités induites font vivre Pont-Rousseau et les alentours. Des entreprises travaillent les abats, d’autres les peaux et les cuirs, les savonneries récupèrent les graisses. Le spectacle est aussi dans la rue : des bovins sont conduits des prairies de Sèvre à l’abattoir à travers ville. Les bêtes sont parfois moins disciplinées. « Quand une bête foutait le camp de l’abattoir, ça mettait la pagaille », s’amuse encore Robert Boudaud.
Déficit chronique
Plus aux normes, notamment en matière de froid, l’abattoir de Pont-Rousseau cesse son activité en 1975, date à laquelle un nouveau site est mis en service le long de la route de Pornic. Sur un terrain de 13 hectares sont édifiés un bâtiment principal de 11 000 m² et des entrepôts frigorifiques de 5 000 m². Mais les déficits d’exploitation sont importants. Les effectifs des abattoirs fondent de 149 employés municipaux et privés en 1982 à 75 en 1988. L’activité tourne alors autour de 14 000 tonnes annuelles. Ne pouvant assumer la mise aux normes européennes de l’abattoir, la Ville de Nantes le cède en 1989 à la société Voillet, abatteur de porcs à Saint-Philbert-de-Grandlieu. En 1990, Voillet s’associe avec Banchereau, société d’abattage du Maine-et-Loire spécialisée dans les bovins. L’activité remonte à 35 000 tonnes pour 300 salariés, mais reste lourdement déficitaire. Voillet est placé en redressement judiciaire fin 1993 et les abattoirs disparaissent de l’agglomération nantaise en 1995. Les bouchers du Sud-Loire se fournissent désormais auprès des abattoirs de Cholet, La-Roche-sur-Yon ou Challans.