L’école la plus haute et « radieuse » de France
(janvier 2022)

Gambader dans une cour à 52 mètres au-dessus du sol, c’est l’expérience unique que vivent au quotidien, depuis 1955, les élèves de la maternelle perchée sur la Maison radieuse…

Avec ses coursives, son bassin et ses deux grosses cheminées, le toit-terrasse de la Maison radieuse évoque irrésistiblement le pont d’un paquebot. Dans leur maternelle, la plus haut perchée de France, les petits écoliers sont des passagers privilégiés qui évoluent – en toute sécurité – dans un espace baigné de lumière et de couleurs, dominant la ville à 52 mètres d’altitude !

Une place de choix pour l’école

Élèves dans la cour, sur la terrasse

Pensées par Le Corbusier comme des « villages verticaux », ses « unités d’habitation » devaient répondre aux besoins essentiels de ses occupants : vie commerçante, circulation, vie collective ou privée. Le toit-terrasse était prévu comme lieu dédié aux activités culturelles et sportives, à la détente et aux loisirs. Initialement, en 1952, les esquisses de l’architecte envisageaient au sommet de la Maison radieuse de Rezé une scène avec des gradins, une bibliothèque, une salle de projection et conférence, un solarium et un mur de sport. À la demande de la municipalité, cette place de choix, ouverte sur le paysage et baignée de soleil, propice pour Le Corbusier « au bien-être physique et à l’épanouissement de l’esprit, notamment pour les enfants », a finalement été attribuée à l’école.

Façades et espaces intérieurs sans contrainte

C’est l’un des jeunes collaborateurs du maître, Iannis Xenakis, qui est chargé de la conception en 1954, alors que la construction de la Maison radieuse est déjà bien entamée. Son école repose sur une structure de poteaux et de poutres qui libère de toute contrainte les façades et les espaces intérieurs, et facilite l’implantation des ouvertures vitrées. L’école initiale comporte trois classes (deux aujourd’hui), une grande salle de motricité, des sanitaires, le bureau de la directrice et un espace pour les enseignants avec mobilier en béton. Au sud, le toit-terrasse est la cour de récréation, articulée autour d’un bassin et de rochers artificiels.

Une partition en façades

Mondialement connu pour ses recherches avant-gardistes mêlant musique, mathématiques et architecture, Iannis Xenakis conçoit ses réalisations comme autant de passerelles entre ces différents domaines. L’école maternelle de la Maison radieuse illustre cette préoccupation : sur toutes les façades, de multiples vitraux dessinent un jeu varié de dimensions, de couleurs, de textures et de sonorités. Ils représentent des « neumes », signes autrefois utilisés pour l’écriture de la musique grégorienne, et confèrent à l’école la forme d’une étonnante partition musicale.

L’école retrouve son aspect d’origine

À l’intérieur de l’école, chaque détail est pensé : depuis le remarquable bar-tisanerie de béton dans la salle de motricité jusqu’aux patères de bois ou la fontaine au design soigné. Au fil des années et de divers travaux, l’édifice avait peu à peu perdu de son caractère d’origine : ici, des vitres abîmées n’avaient pas été remplacées à l’identique, là on avait posé un faux plafond, ailleurs les patères cassées avaient laissé place à des crochets vissés… Il était temps d’intervenir, et c’est en cours ! À de nécessaires travaux de correction des infiltrations d’eau (réparation des bétons, réfection de l’étanchéité et isolation de la toiture terrasse, rénovation des façades) se sont adjoints des travaux pour améliorer le confort acoustique intérieur. Les vitrages de façades et certains éléments intérieurs (plafonds…) ont retrouvé leur aspect d’origine, sous la supervision d’un architecte du patrimoine, le site étant classé depuis vingt ans Monument historique « Il n’était pas question de dénaturer l’œuvre de Le Corbusier en offrant à l’école un lifting nécessaire. Exceptionnellement, l’enjeu patrimonial a primé sur les préoccupations thermiques. Il faut saluer le travail effectué en ce sens par les services du bâti et du patrimoine, en lien avec les Monuments historiques », souligne Anas Kabbaj, adjoint délégué aux services urbains et au patrimoine mobilier et immobilier. Les travaux lourds et bruyants ont été réalisés pendant l’été, avec l’aide d’un spectaculaire monte-charge installé sur le pignon nord du bâtiment pour acheminer matériaux et travailleurs jusqu’au sommet.

Coût du projet : 767 000 € TTC (projet subventionné à environ 66% par la Drac, la Région, le Département, l’État et la CAF).

Visites de la Maison radieuse

Tous les mercredis à 16h et tous les samedis à 11h. Réservation au 02 40 84 43 60. Tarifs : de 2,50 à 5€ (voir conditions sur reze.fr). Nombre de places limité.