La Morinière a abrité une sablière jusqu’en 1975. Celles de Trentemoult vont être transférées à Cheviré.
« J’ai dragué toute ma vie,… mais du sable de Loire ! » C’est ainsi que Michel Friot résume, plein de malice, sa vie de marchand de sable. Né en 1925, il démarre son activité en 1942, suivant la voie tracée par son grand-père et son père. Le dépôt de sable familial est né en 1923 au pied du pont de la Morinière, face au quai Léon-Sécher. À ses débuts, la sablière des bords de Sèvre n’a ni grue ni trémie. Les mariniers-sabliers déchargent à la brouette. Assez vite, la mécanisation rend le travail moins pénible. La matière première abonde. Michel Friot se souvient que « la Loire était pleine de sable. On draguait au confluent de la Sèvre et de la Loire, entre les ponts de Pirmil et de Pornic ». Le sable est transporté par des chalands de 26,50 m de long, qui peuvent acheminer 80 m3, soit environ 150 tonnes. En ces temps, la Sèvre n’est navigable qu’à marée haute. Quand la marée est bonne, deux chalands pleins se dirigent vers la Morinière, tandis qu’un troisième repart à vide vers la Loire.
Du sable de Loire…
Ce sable est destiné au maraîchage et à la construction. Les maraîchers, très nombreux sur Rezé, Vertou et Nantes, l’utilisent dans leurs cultures sous châssis, notamment pour les carottes et les melons. Le grain du sable de Loire convient parfaitement à la production de ciment, les besoins sont énormes pour la reconstruction d’après-guerre. La ressource s’épuisant, il faut aller draguer de plus en plus loin, jusqu’au Cellier. En 1971, Michel Friot s’associe avec des collègues pour monter un dépôt de sable sur la Divatte. Celui de la Morinière, alimenté un temps par des semi-remorques, ferme définitivement en 1975. Mais ce n’est pas la fin des marchands de sable de Rezé.
… au sable marin
Dès 1969, deux sociétés se sont installées sur des terrains du Port Autonome à Trentemoult. Trouillard et fils, devenue SNA, implante la centrale à béton qui porte aujourd’hui le pendule de Roman Signer, tandis que les Sablières de Cheviré gèrent le stock de sable. « Le site présente l’avantage d’être proche du gisement, d’une grande agglomération et des voies de desserte », observe Cédric Bouyer, chef du service animation et gestion de zone au Port de Nantes Saint-Nazaire. L’activité prend son essor pour atteindre 200 000 tonnes annuelles, acheminées en seulement 21 voyages. Les navires ont pris une autre dimension. Bientôt le lieu de ressource change à son tour. En 1995, pour arrêter l’érosion des berges, le dragage en Loire est interdit. Le sable qui arrive à Trentemoult est prélevé au large des côtes. Afin de convenir aux cimentiers et aux maraîchers, le sable marin doit être lavé de son sel à l’eau et criblé pour enlever les coquillages.
Suite de l'histoire à Cheviré
Dès 2003, Nantes Métropole étudie un transfert des activités de Rezé vers Cheviré aval, où sont déjà installées trois sablières. L’idée est de réaffecter l’usage de ces trois hectares : l’embarcadère du navibus pourrait être aménagé à proximité du Pendule et une esplanade permettrait d’accueillir des manifestations, des cirques… Si la destination finale du terrain est à l’étude, les deux sociétés auront quant à elles bien quitté Trentemoult d’ici la fin de l’année. Le terminal sablier de Cheviré, où le Port a investi 2 M€, les attend pour cette nouvelle page de leur histoire.