La Sèvre, rivière aux 140 moulins
(mai 2019)

Au fil des pages d’un beau livre, Fabienne Raimbaud invite à découvrir la Sèvre, de la source au confluent, au long d’une balade dessinée et documentée qui raconte l’histoire de la rivière.

Fabienne Raimbaud pratique depuis une dizaine d’années, en amateur, le croquis en extérieur à l’aquarelle : « J’illustrais ainsi mes carnets de voyage à l’étranger. Puis j’ai eu envie de dessiner ici. » C’est-à-dire près de chez elle, à Vertou. « Je cherchais un fil conducteur que j’ai trouvé lors d’une balade au bord de la Sèvre. Conquise par le paysage et les moulins, j’ai commencé à me documenter. Je pensais que ça irait vite… »

De fait, le voyage dure quatre belles saisons de remontée du courant, au départ de Rezé puis, de méandre en moulin, au long des quelque 136 km de la Sèvre. D’abord partie « à l’aventure », armée de son sac à dos qui contient carnets et aquarelles, Fabienne Raimaud a rapidement organisé son périple : « Aux beaux jours, balades et dessins. Pendant l’hiver, récupération de documentation auprès des institutions et repérage sur Internet. » Sur le terrain, la rencontre des riverains enrichit ses connaissances.

Moulins à eau

Fabienne visite les écomusées, explore les archives, de découverte en découverte. «  Bien qu’appelée « nantaise », la Sèvre traverse quatre départements depuis les Deux-Sèvres où sa source n’est pas précisément définie, constituée par plusieurs ruisseaux, à 215 m d’altitude. » Après un passage en Maine-et-Loire, c’est en Vendée que se situe la majeure partie du cours d’eau. L’indolente rivière de l’aval est en amont un torrent parsemé de rochers granitiques. L’utilisation de sa puissance hydraulique est attestée dès le 11e siècle, mais c’est au 19e siècle, avec la révolution industrielle, que l’activité est la plus importante.  Pas moins de 140 moulins, dont plus d’une centaine sont toujours debout, captent l’énergie de la rivière pour alimenter de multiples activités : tannage, fabrication de papier, filage, tissage, meunerie, forge… Pour maîtriser le courant et assurer une activité régulière, des « chaussées » jouxtent les moulins, canalisant l’eau vers la roue. De Monnières à Nantes en passant par Rezé, la Sèvre navigable est aussi une voie de transport des marchandises et matériaux. Ainsi, tout au long de la rivière, des milliers de personnes vivent directement ou indirectement de sa présence.

La vie tumultueuse de la Morinière

Du modeste atelier à l’imposant site industriel, de nombreuses traces témoignent de cette activité fourmillante. À Rezé, le site de la Morinière a ainsi accueilli successivement un dépôt de poudre, une fabrique royale d’engrais, une savonnerie, une tannerie, une usine chimique dont demeure la cheminée. À côté, les lavandières exerçaient leur métier sur des bateaux-lavoirs…

Dessins au fil de l’eau

Ce qui n’est plus observable aujourd’hui, Fabienne Raimbaud le dessine à partir de récits, de gravures ou de photographies. Au fil du livre, entre belles illustrations, récit de voyage (des textes manuscrits racontant sa promenade, ses impressions…) et ouvrage historique (les légendes des dessins truffées d’informations), on parcourt avec l’auteur la rivière d’hier et d’aujourd’hui, dans des paysages préservés ou peuplés de fantômes du passé. Patrimoine architectural et industriel, mais aussi nature, douce ou sauvage : « Il y a des « rivières de pierres » impressionnantes, une flore et une faune riches… » De nombreuses anecdotes ponctuent le texte.

L’ouvrage peut être lu au coin du feu ou devenir un compagnon de randonnée : « J’ai dû obtenir des autorisations pour accéder à quelques sites privés, mais la plupart des lieux que j’ai dessinés sont visibles par tous les promeneurs. Je suis heureuse de partager mes découvertes en racontant cette rivière qui a fait vivre des villages entiers, et dont on a un peu oublié l’histoire. »

La Sèvre nantaise, de la Loire à la source, Fabienne Raimbaud, éditions Coiffard, 29,50€