Jean-Baptiste Daviais : parcours d’un humaniste
(avril 2014)

Le 27 avril, Rezé va honorer la mémoire de ses déportés. Parmi eux, Jean-Baptiste Daviais, Rezéen d’origine, désigné comme futur maire de Nantes juste avant la Libération, et mort en déportation à Dachau. Un homme dont le parcours aura été marqué par l’humanisme et l’intérêt général. 

Bas-relief de Jean-Baptiste Daviais érigé en 1946 dans le square de la Fraternité situé boulevard Le Corbusier,
à proximité de la place Jean-Baptiste-Daviais (place de la mairie).

Né le 21 juillet 1878 à Rezé, Jean-Baptiste Daviais est issu d’une famille d’ouvriers. Il fréquente l’école communale puis l’école professionnelle boulevard de Launay, à Nantes. Il en sort à 14 ans pour commencer un apprentissage de charpentier de navires. A 20 ans, il est chef traceur aux Chantiers de la Loire. Un chantier situé sur le site de la Prairie-au-duc qui fabrique des trois mâts en bois mais aussi des navires militaires. De petite taille, mais robuste, Jean-Baptiste supporte vaillamment la fatigue de 10 heures de travail. Puis il part  participer aux travaux publics menés par la France au Sénégal et au Niger, pour le compte de l’administration coloniale. Il organise ainsi un service de navigation fluviale.

Jack-Alain Guiho devant la statue de Jean-Baptiste Daviais dans le square du même nom à Nantes. Avec sa cousine, Marie-Annick Jalladeau, il ne manque jamais de participer aux cérémonies commémoratives. Son grand-père maternel, Maurice Macé (ancien maire adjoint de Doulon) était le cousin germain de Jean-Baptiste Daviais. Jack-Alain Guiho a bien connu le fils adoptif de Jean-Baptiste Daviais, Charles Viaud, peintre de la Marine et conservateur du musée de la pêche à Concarneau.

Du négoce de bois aux  œuvres sociales 

La guerre est finie : Jean-Baptiste Daviais a 40 ans. Il revient à Nantes et crée, avec son associé Maillaud, une société d’importation de bois qui s’agrandit au fil des ans et devient très prospère. « Jean-Baptiste retourne alors plusieurs fois au Niger pour le négoce du bois », témoigne Jack-Alain Guiho, dont le grand-père maternel Maurice Macé était cousin germain avec Jean-Baptiste Daviais. Ce qui n’empêche pas le « bonhomme de bois », comme le surnommeront plus tard ses amis de la Résistance, d’être à pied d’œuvre dans la vie associative de la cité, notamment en faveur des plus déshérités.
Au début des années 1930, il fonde à Nantes La Maternelle, une société d’entraide pour les pupilles de l’Etat (lire l’encadré). En 1936, le journal L’Ouest-Éclair évoque le Secours immédiat, une société créée en 1929 au plus fort de la grande crise, pour venir en aide aux nécessiteux. Jean-Baptiste Daviais en est alors le vice-président.

Un laïc républicain

 La loi de séparation de l’État et de l’Église est assez récente (1905). « Pur républicain» très attaché aux valeurs sociales, Jean-Baptiste Daviais participe en 1935, avec notamment le socialiste Maurice Daniel, à la fondation de la Fédération des amicales laïques des écoles publiques de Nantes et de sa banlieue. Il initie alors de grandes rencontres sportives et des kermesses.

« Quand mon futur mari, Émile, est sorti de l’assistance publique en 1938, c’est monsieur Daviais qui est devenu son parrain avec son association La Maternelle. Il le recevait chez lui, lui prodiguait de bons conseils. Quand Émile s’est ensuite engagé comme matelot dans la marine, il lui écrivait. Mais en 1941, Emile a été démobilisé avec son bateau. Il a refusé de servir sous le régime de Pétain. Il s’est soustrait au STO (Service du travail obligatoire). Jean-Baptiste Daviais l’a alors accueilli plus de 19 jours chez lui. C’est à cette époque que j’ai connu Emile. Quand il a été question de mariage, M. et Mme Daviais nous ont reçus chez eux. Emile devait lui présenter sa future épouse. J’étais très impressionnée. Il nous recevait régulièrement, nous demandait si on avait besoin de quelque chose. Mon mari se rendait souvent chez lui. Après sa mort, nous sommes restés en contact avec son épouse et avec son neveu Charles Viaud, qui était son fils adoptif. » En photo, Marguerite Lusseau avec le cadeau de mariage offert en août 1942 par Jean-Baptiste Daviais et son épouse à l’occasion de son mariage avec Émile Lusseau

De la Résistance au camp de concentration 

La Seconde Guerre mondiale vient d’éclater. La débâcle de 1940 et l’exode jettent à la rue de nombreuses personnes. Jean-Baptiste Daviais ouvre un centre d’accueil, impasse Saint-Laurent près de la cathédrale, dans une vieille maison inoccupée. Entre 60 et 80 réfugiés belges et français du Nord y trouvent chaque jour le gîte et le couvert. Quand la place manque, lui et son épouse n’hésitent pas à ouvrir leur propre maison, boulevard des Anglais. Au moment où la Résistance se structure, on pense à lui. Son équipe constituée notamment de Léon Jost, Yves Bodiguel, Libertaire Rutigliano passe au service du mouvement Libération, fondé par Emmanuel d’Astier de la Vigerie. Il apporte son concours pour obtenir des renseignements. Il héberge des Juifs traqués et des réfractaires au STO. Il leur fournit papiers, argent et lieux de travail. Il est désigné pour devenir le futur premier magistrat de Nantes libéré. Mais après les aveux sous la torture d’un jeune militant, Jean-Baptiste Daviais est arrêté avec plusieurs de ses compagnons le 17 avril 1944. Torturé à Angers, transféré à Compiègne puis à Dachau, il y décède le 9 janvier 1945 dans des circonstances rapportées par son camarade d’infortune Gabriel Goudy. « Le 7 janvier, il a été contraint de rester nu dans la neige au sortir de la douche. Il fut frappé de congestion et mourut deux jours plus tard à 67 ans. »