Droit de vote des femmes, être éluEs : le combat fut long… (mars 2025)

Autant d’élues que d’élus à la municipalité. C’est la norme à Rezé depuis 2001, mais le chemin a été long pour atteindre la parité. Il a commencé le 21 avril 1944, avec la reconnaissance des femmes en tant que citoyennes électrices, et potentiellement élues.

Dans la première moitié du 20e siècle, lentement, dans le monde, les femmes obtiennent le droit de vote. Les Françaises doivent patienter jusqu’en 1944 pour voir reconnu leur statut de citoyenne, et pour l’exercer en 1945 lors des municipales. À Rezé, les 29 avril et 12 mai, elles sont cinq élues sur la liste de gauche d’Arthur Boutin (SFIO) : Jeannine Billon, Philomène Le Floch, Anne-Marie Le Guilloux, Albertine Le Guyader et Marie Potet. Les archives ne gardent pas trace de leurs actions. À l’époque, les comptes-rendus des réunions du conseil municipal étaient peu détaillés…

« Envie de s’engager dans sa commune »

En 2012, pour l’exposition « Les zélues », le centre socioculturel Loire-et-Seil avait recueilli le témoignage de descendants ou proches de trois d’entre elles, dont Guy Le Floch, fils de Philomène : « On avait demandé à ma mère de se présenter pour occuper une place que reprendrait mon père, communiste et résistant, à son retour de déportation. Mais il a été exécuté d’une balle dans la tête, le jour même où ma mère était élue, le 29 avril 1945. » Anne-Marie Le Guilloux (PC), institutrice puis mère au foyer, « avait envie de s’engager dans sa commune, d’être proche du peuple ». Ses cinq enfants étaient tous élevés et mariés, elle pouvait se consacrer à son poste d’adjointe au maire en charge des affaires sociales. Jeannine Billon est restée conseillère municipale pendant deux ans. Sa fille raconte : « Nos parents étaient tous deux militants au sein de la section SFIO de Rezé, ce qui a compté certainement dans ses motivations. On peut penser également que la volonté de s’impliquer en tant que femme dans la vie politique de la commune pour défendre les valeurs de la gauche, de la Résistance a certainement pesé, ainsi que le fait de se présenter au moment où les femmes avaient, enfin, le droit de vote. »

Voix ténue parmi les voix masculines…

En 1949, après la démission d’Arthur Boutin, Georges Bénezet (RPF) est élu avec, à nouveau, cinq femmes dans sa liste, dont Gisèle Hémon (PCF) qui démissionne en janvier 1950, Eugénie Lagathu (PCF), Joséphine Fortin (RPF), Marie-Louise Monteil (RPF) et Marie Gendron (MRP). De cette dernière, on sait qu’elle a assuré deux mandats, jusqu’en 1959, qu’« il lui manquait la puissance de la voix pour se faire entendre parmi des hommes plus ou moins respectueux »

Habituer ces messieurs à notre présence dans les lieux de décision

Une section de vote organisée par la Ligue du droit des femmes à la Coopérative l’ Egalitaire

En mars 1959, la liste d’Alexandre Plancher est exclusivement masculine. Ce n’est qu’en 1965, pour son deuxième mandat, que le maire SFIO puis PS inclut deux femmes dans son conseil : Gisèle Dugué (PSU), et Arlette Routier-Leroy (PS). Cette dernière raconte : « J’ai été désignée, non en tant que femme, mais en tant que membre de la SFIO. J’avais 27 ans. » Ajoutant ironiquement : « Bien entendu, c’est à la commission du personnel et au bureau d’aide sociale que je fus nommée […] Rien de bien glorieux dans tout cela mais seulement, peu à peu, habituer ces messieurs à notre présence dans des lieux de décision. »

Faire évoluer la place des femmes dans la société

En 1971, Alexandre Plancher est réélu avec trois conseillères municipales (sur 31 élus), dont Nicole Perrochaud (PCF), enseignante, qui avait « envie de travailler à une meilleure gestion des cantines scolaires pour proposer un prix de repas adapté aux ressources des familles ». Elle se souvient avoir proposé la création d’une crèche municipale : « L’investissement était important, certes, mais, ce jour-là, le Conseil municipal a préféré voter le financement d’un centre de tir ! Question de choix… ». En 1977, Anne Quillaud, (PCF) figure parmi les six adjoints au maire, aux côtés de cinq conseillères municipales, dont Ginette Blandin qui assurera trois mandats, avec la volonté « de faire évoluer la place des femmes dans la société. »

2001 : la parité… enfin !

En 1982, le Conseil constitutionnel censure une loi qui prévoyait un quota de 25 % de femmes dans les listes des élections municipales. Quota cependant atteint à Rezé en 1983, avec l’arrivée de Jacques Floch et de 10 femmes sur 39 élus.
Mais ce n’est qu’en 2001 que l’égalité est instaurée… grâce à la loi du 6 juin 2000 imposant la parité femmes-hommes sur les listes dans les villes de 3 500 habitants et plus. En 2022, Agnès Bourgeais, première adjointe, succède à Hervé Neau après son décès, devenant la première maire de l’histoire de Rezé.

Michelle Charpentier, première conseillère générale de gauche en Loire-Atlantique.

Elle raconte

J’ai adhéré au PS en 1973 et suis devenue conseillère municipale en 1977. En 1978, le parti m’a désignée pour briguer la succession au conseil général d’Alexandre Plancher, qui venait de décéder. Je  n’aurais pas été candidate si on ne me l’avait pas demandé. Les femmes n’osaient pas, contrairement aux hommes, qui se sentaient légitimes. J’ai remporté l’élection. C’était la première fois que la gauche confiait à une femme un canton « gagnable ». Lors des réunions, je faisais un peu tache avec mes 30 ans et ma 2 CV ! J’ai passé 23 ans au conseil général, puis je suis devenue assistante parlementaire. Cette carrière imprévue m’a permis de « grandir », d’apprendre plein de choses. Entre autres, que l’on gagne à avoir des femmes en politique !