L’exposition « C’est arrivé près de chez vous » se tient au Chronographe jusqu’au 7 janvier 2024. Elle revient sur treize opérations de fouilles récentes conduites à Rezé et dans six autres communes de l’agglomération. Avec la mise au jour de résultats remarquables.
Les fouilles archéologiques sont inscrites depuis de nombreuses années dans le paysage rezéen. À l’échelle métropolitaine, leur généralisation est plus récente. Mais réelle : 150 opérations y ont été menées depuis 2010 ! C’est cette accélération que le Chronographe et le Pôle archéologique de Nantes Métropole, soutenus par la DRAC Pays de la Loire et l’Inrap*, ont voulu valoriser à travers l’exposition « C’est arrivé près de chez vous », qui revient sur dix ans d’archéologie dans la métropole. Ses concepteurs ont sélectionné les treize chantiers de fouilles les plus marquants. Ces opérations, programmées ou préventives dans le cadre d’aménagements urbains, en milieu rural ou dans l’hyper centre de Nantes, révèlent une grande diversité de formes et de temps d’occupation, de la ferme gauloise au cimetière médiéval.
* Direction régionale des affaires culturelles et Institut national de recherches archéologiques préventives
L’ÂGE DU FER SE DÉVOILE
Plusieurs opérations récentes ont permis d’améliorer les connaissances sur le territoire pendant l’âge du Fer, cette période qui s’étend de 800 avant notre ère à la fin du Ier siècle de notre ère. « Grâce aux fouilles récentes, on en sait plus sur la fondation des villes de l’agglomération et des fermes, sur l’installation de communautés humaines autour de la Loire et de ses affluents », relève Cécile de Collasson, la responsable du Chronographe. Bien identifiés, les trois premiers pôles à avoir émergé sont ceux de Mauves, de Nantes et de Rezé (ou Ratiatum, le nom antique) lequel a fait l’objet des fouilles les plus complètes.
NOUVELLES AVANCÉES SUR RATIATUM
La dernière campagne menée à Rezé date de 2020-2021, dans le cadre de fouilles préventives en amont du projet urbain Carré Daviais. Elle a confirmé l’ampleur de la cité antique en dévoilant un prolongement des aménagements portuaires sur une grande longueur. « On a constaté les mêmes techniques de construction et les mêmes datations que sur les parties déjà fouillées autour de Saint-Lupien, avec juste quelques variantes de mise en œuvre », note Cécile de Collasson. Ces quais en bois ont ainsi livré des marques d’assemblage sur sablière et poteau qui sont en cours d’étude par les archéologues. Certains de ces bois seront peut-être un jour visibles au Chronographe.
GRÂCE AUX POLLENS, ON EN SAIT PLUS !
Le travail d’analyse des archéologues s’appuie sur des disciplines variées et l’exposition montre comment les progrès scientifiques influent sur la connaissance, de la lecture stratigraphique d’un site à l’analyse des graines, des pollens, des charbons…
Ces informations donnent une lecture des espaces fouillés en termes de datation, de biodiversité mais aussi d’aménagements. Ainsi l’étude des pollens (palynologie) et des graines sur une ancienne ferme gauloise sur la ZAC Doulon-Gohards a permis de distinguer les aires de battage et d’élevage et d’identifier les espèces d’animaux élevées, en l’occurrence des moutons, des porcs et des bœufs.
QUAND LES MORTS PARLENT
Les dernières années ont été marquées par les fouilles de plusieurs nécropoles et cimetières allant de l’âge du Fer au Moyen Âge. Sur la nécropole antique de la rue d’Auvours, à Nantes, plus de 17 000 fragments de céramiques ont été mis au jour. Alors qu’à Saint-Herblain, sur l’ancien cimetière de l’église Saint-Hermeland, pas moins de 350 sépultures ont été découvertes. Autant d’éléments précieux qui « aident à lire la composition sociale, les rites funéraires et l’état de santé des populations de l’époque », note Cécile de Collasson.
DES OBJETS REMARQUABLES
Le travail mené avec la DRAC et les responsables d’opérations permet au visiteur d’avoir le privilège de découvrir quelques objets issus de fouilles récentes. Comme ces seaux en bois, remarquablement conservés et vieux d’environ 2 300 ans, issus de la fouille d’une ferme gauloise à Carquefou. Deux objets découverts dans une nécropole de l’âge du Fer, une fibule et une pince à épiler, ont été spécialement restaurés pour l’exposition.
Jusqu’au 7 janvier 2024 au Chronographe, rue Saint-Lupien.
INFOS – 02 52 10 83 20,lechronographe.nantesmetropole.fr
Ratiatum est exceptionnel !
Les toutes premières ruines gallo-romaines de Ratiatum ont été découvertes en 1860. Mais c’est dans les années 2000 que les fouilles archéologiques se sont intensifiées sur le site rezéen de Saint-Lupien. Construit au Ier siècle de notre ère, un quai monumental en bois plutôt bien conservé a été découvert en 2011. Les archéologues le comparent à ceux de Londres ou de Xanten en Allemagne. Ratiatum est de fait le seul site archéologique de la façade atlantique à présenter un port avec ses trois entités : un espace navigable, des aménagements de la berge avec ce quai s’étirant probablement sur plus d’1,5 km, ainsi que des entrepôts de stockage et des boutiques et ateliers de vente des marchandises. L’état de conservation et l’importance de ces
ouvrages datés du Ier et IIe siècles incitent les archéologues Jimmy Mouchard et David Guitton, qui ont dirigé la campagne de fouilles de 2014, à penser que « Ratiatum a bénéficié, il y a plus de 2 000 ans, d’un schéma d’urbanisation concerté, d’un financement et d’une volonté politique forte pour permettre son développement ». La concertation était déjà à l’œuvre chez nos ancêtres.