De mémoire de marché ! (mai 2022)

Depuis 1951, tous les vendredis matin (sauf 25 décembre et 1er janvier), les commerçants s’installent sur la place du 8-Mai et attendent leurs clients. Certains sont là depuis plus de quarante ans et ont bien du mal à penser « retraite » car au marché règne l’esprit de famille.

Le marché du 8-Mai fête ses 70 ans. Et certains commerçants sont là depuis presque aussi longtemps. De ses débuts, quand il était situé à l’emplacement actuel de l’immeuble l’Agora, puis sur le parking, puis à côté de la gare pendant les travaux du parking souterrain avant son retour, le marché a vu passer de nombreux commerçants. Et de nombreuses histoires !

Un monsieur s’y est promené avec son boa sur les épaules, faisant peur à beaucoup (on imagine !). « Il y a eu Hélène, l’oie qui déambulait sur le marché. C’était un peu la mascotte, se souvient l’agent municipal Damien Brossier, dix-neuf ans comme placier et depuis dix ans chargé d’action commerciale et d’occupation. Tout le monde lui parlait, les enfants étaient fans. Puis un jour, elle s’est fait kidnapper par un type. Marc, son maître, lui a couru après et a réussi à la récupérer mais ensuite, traumatisée, elle restait dans sa cage. » Certains commerçants se souviennent aussi d’une manifestation du côté du pont de Pirmil qui avait dégénéré et qui s’était repliée près du marché. Du coup, les commerçants et les passants avaient aussi été victimes des gaz lacrymogènes !

Marché de la place du pays de Retz dans les années 1970

Le marché est une famille

De 122 abonnés en 1993, ils ne sont plus que 54 aujourd’hui, auxquels s’ajoutent les marchands occasionnels, entre 15 et 35. « Un départ en retraite sur quatre n’est pas remplacé, explique Damien Brossier. C’est un métier physique, parfois pénible, les repreneurs sont rares. » Pourtant, tous le disent, le marché est une famille. Des mariages et des naissances y ont été célébrés, des décès pleurés.

Dès 2h30…

Le premier arrivé est le crêpier : dès 2h30, il fabrique ses pâtes. Puis, le rejoignent, vers 4h, quelques primeurs avant que n’arrivent, vers 5h, les poissonniers qui posent leurs remorques et vont au Min. Beaucoup s’installent à partir de 6h. A partir de 6h30, les agents de la mairie vérifient qu’il n’y a pas de voitures encore stationnées. « Un jour, j’ai vu un riverain arriver à toute allure en pyjama pour récupérer sa voiture, se rappelle Damien Brossier. Une jeune étudiante aussi, en larmes, qui ne pouvait pas récupérer sa voiture car elle était encerclée par les étals des commerçants. » À 8h tous les abonnés sont installés, le tirage au sort pour attribuer les places aux occasionnels a alors lieu. À 12h45 tout le monde remballe pour le nettoyage.

vêtements

René Dubois, quarante et un ans de marché

Mes grands-parents faisaient les marchés. Mon père a été l’un des premiers à avoir son étal sur le marché du Château. J’ai des cousins et cousines un peu partout sur le marché, c’est une histoire de famille. D’ailleurs, mes grands-parents étaient très connus car il n’y avait pas de grande surface jadis, tout le monde allait au marché. Dès mes 8 ans, j’accompagnais mon père. Quand il faisait trop froid, il nous laissait à l’hôtel du Cheval blanc avec un chocolat chaud. Je suis à la retraite mais je ne peux pas parler aux murs de la maison. J’ai toujours fait du commerce, je ne peux pas m’en empêcher. Et quand ma femme Chantal prendra sa retraite, c’est Jessica, notre fille, qui reprendra.

"le roi des Nems"

Hoa Le Van, quarante ans de marché alimentaire

En mars, on m’a fêté mes quarante ans de marché. Madame la maire est venue me remettre un cadeau, on a bu un coup, ça fait chaud au cœur. J’ai commencé avec une table de deux mètres, puis j’ai eu une remorque et, maintenant, on a le camion et neuf salariés. L’ambiance est bonne, c’est une famille, le marché. On fête les anniversaires des collègues, on boit un verre à la fin, mais beaucoup d’amis sont déjà partis en retraite. Je le pourrais moi aussi mais ça fait partie de ma vie, je suis bien ici, j’arrive à 6h, je prends un café avec les collègues et je retrouve mes clients fidèles.

vêtements

William Roche dit "Fanfan", soixante-dix ans de marché

Petit, j’étais couché sous l’étalage de linge de maison de ma mère, avec une couverture, et je faisais des nœuds aux lacets des grands-mères, qui avaient du mal à repartir ensuite. Ce n’était pas très sympa ! À 12 ans, quand je n’avais pas école, je l’aidais puis je me suis mis à vendre des pulls sur un petit étal, à côté d’elle. L’ambiance n’est plus la même qu’avant, on avait droit à l’alcool (rire). Certains hivers tellement rigoureux, la toile gelait, on faisait des feux dessous pour la dégeler à la fin du marché et on buvait du rhum pour se réchauffer. Je viens de temps en temps parce que ça me manque et j’ai une trop petite retraite.

fruits de mer

Monique Front, cinquante-quatre ans de marché

J’ai commencé le dimanche à 12 ans avec mon père ostréiculteur. J’étais une petite fille très timide, je ne voulais pas, et, finalement, ça m’a fait du bien, je ne peux plus m’en passer aujourd’hui. Mon fils a repris l’affaire, je suis en retraite mais je continue tant que je peux. J’aime être en contact avec les gens. Avec mon mari, on s’est fait des amis sur le marché, qui venaient à la pêche en mer, avec qui on buvait un petit coup après le marché. L’ambiance est très bonne mais il y a moins de monde qu’avant, notamment à cause du manque de stationnement et peut-être du changement des habitudes.

Cinq marchés

Mardi au Château
8h30-12h45
Place Odette-Robert (ex-place du Pays-de-Retz)
23 commerces alimentaires et manufacturés et de 5 à 10 occasionnels.

Jeudi à Ragon
16h-19h30
Parking du centre socioculturel Ragon, rue du Vivier
4 commerces alimentaires et 1 occasionnel.

Vendredi à Pont-Rousseau
8h-12h45
Place du 8-Mai
54 commerces alimentaires et manufacturés et 15 à 35 occasionnels.

Samedi à Trentemoult
8h30-13h
Parking-relais du Port, quai Robert-Surcouf
13 producteurs et commerçants alimentaires (produits bio).

Dimanche à Ragon
8h30-12h45
3 commerces alimentaires.