Quand ils sont arrivés à la Houssais il y a plus de 50 ans, c’était encore la campagne. Camille, Jacqueline, Marcel, Odette, Yvette, Michelle et Auguste racontent la naissance d’un quartier.
En 1955-56, l’avenue de la Houssais n’est encore que “le chemin vicinal n° 17”. Alentour, la campagne. Le lotissement est issu de la division du domaine du château de La Houssais rasé après-guerre. On est en pleine reconstruction. L’État encourage les particuliers à bâtir des logements en offrant des primes au mètre carré construit.
Camille, Jacqueline et Marcel, Michelle et Auguste, Odette et Yvette font partie des vaillants pionniers qui acquièrent l’un des 280 lots, de 300 m² en moyenne, répartis de part et d’autre du chemin : « On pouvait acheter des plans vendus par le ministère de la Reconstruction et du Logement, ce qui donnait droit à une prime plus importante. » Ces plans fixent non seulement l’aspect du bâtiment et son aménagement, mais réglementent aussi les matériaux utilisés et imposent le respect de certaines normes.
Les habitants s’organisent
L’école maternelle est construite dans la foulée. Indispensable, vu l’arrivée massive de marmots ! « Rien que dans les vingt premiers numéros de la rue, il y en avait une quarantaine ! La plupart des familles avaient quatre ou cinq enfants. L’école a été construite à l’emplacement d’un plan d’eau qu’il a fallu assécher. » Les plus grands vont en classe à Pont-Rousseau.
Rapidement, les habitants se constituent en association, notamment pour obtenir le tout-à-l’égout qui n’était pas compris dans le prix des terrains.
Beaucoup travaillent à l’Aérospatiale, aux Batignolles et aux Chantiers de Bretagne, grosses entreprises qui participent au logement de leurs employés dans le cadre du 1% patronal. Un ramassage par car est même organisé pour aller à l’Aérospatiale. Ceux des Chantiers ont moins de chance : ils vont bosser à vélo ou à mobylette. D’autres encore doivent aller jusqu’aux Trois-Moulins pour prendre le bus.
La vie de quartier s’organise « avec une grande solidarité ». « L’association des familles de France avait acheté un lave-linge équipé de roulettes qui circulait de maison en maison. La machine lavait le linge, mais il fallait encore le rincer à la main puis l’essorer avec une machine à rouleau. » Auguste, qui possède une camionnette, se charge d’aller acheter les pommes de terre pour tout le monde. « Et on avait tous un potager. Pas de jardin d’agrément à l’époque ! »
Arrivée du centre commercial
On va chercher le lait à la ferme qui a été remplacée par la maison de quartier, ou à celle de la Classerie. On guette le passage du boulanger, du boucher, de l’épicier qui font leur tournée. Puis une supérette des Docks de l’ouest s’installe au bout de la rue de la Houssais. Mais c’est bien sûr l’arrivée du centre commercial sur l’avenue toute proche qui met fin aux tournées des petits commerçants et change radicalement la vie à La Houssais comme ailleurs.
Peu à peu, les pionniers laissent la place à une nouvelle génération. Le passage de flambeau se fait en douceur : « On s’entend très bien avec nos nouveaux voisins. » Ceux-là ont sans doute du mal à croire qu’il y a 50 ans, des vaches paissaient au bout de leur jardin dans des prés couverts de marguerites, et que l’on voyait la cathédrale de Nantes depuis leur maison. Camille et ses amis leur raconteront peut-être ces temps héroïques, autour d’une belote…