Suspension de l’arrêté anti-pesticides mais reconnaissance d’un enjeu local

La Ville de Rezé a pris le 1er octobre 2019, un arrêté interdisant l’usage des produits phytosanitaires chimiques de synthèse sur son territoire.  Le juge administratif vient de suspendre l’arrêté tout en reconnaissant un enjeu local pour la commune de Rezé concernant les pesticides.

Une carence législative

Depuis 2017, la loi interdit déjà aux collectivités l’utilisation de produits phytosanitaires chimiques pour entretenir les espaces verts et la voirie et, depuis janvier 2019, l’interdiction a été élargie aux particuliers et aux jardiniers amateurs.

Néanmoins, les espaces verts non ouverts au public, les copropriétés et les terrains gérés par des entreprises privées ne sont pas soumis à l’interdiction de recourir à ce type de produits.

Une carence législative que les collectivités comme la Ville de Rezé entendent dénoncer.

Un arrêté pour interpeller

Le conseil municipal de Rezé a adopté, le 27 septembre 2019, un vœu demandant l’interdiction des produits phytosanitaires chimiques de synthèse. Ce vœu a été suivi, le 1er octobre 2019, d’un arrêté interdisant l’usage de ces produits sur le territoire de la commune. Cette décision s’applique aussi bien aux professionnels qu’aux particuliers. Cet arrêté s’ajoute à ceux de plusieurs autres communes (Langouët la première puis Paris, Lille, Nantes, Grenoble, Clermont-Ferrand, La Chapelle-sur-Erdre, etc.).

En désaccord avec le vœu et l’arrêté pris, le préfet de Loire-Atlantique a saisi, le 4 novembre, le juge des référés auprès du tribunal administratif de Nantes, pour en obtenir la suspension.

Lors de l’audience du 18 novembre, l’Etat a notamment considéré que la commune de Rezé n’avait ni la compétence, ni un intérêt à agir en la matière.

Par deux ordonnances datée du 29 novembre, le juge des référés a suspendu l’arrêté mais a refusé d’accéder à la demande du préfet pour le vœu.

 

La Ville de Rezé était consciente des risques de suspension qui pesaient sur son arrêté. Bien que la commune regrette cette suspension, cette décision est cohérente compte tenu de la jurisprudence actuelle (identique aux situations à Nantes et La Chapelle-sur-Erdre). « Nous savons que l’Histoire nous donnera raison et que la législation finira par évoluer pour mieux prendre en compte la protection des populations et de l’environnement » déclare le maire de Rezé.

Le juge a considéré que les circonstances locales n’étaient pas assez avérées et précises pour justifier une intervention du maire via ses pouvoirs de police. Le juge a cependant refusé de suspendre le vœu comme le souhaitait l’Etat.

Fait assez rare, le juge a même condamné l’Etat à verser 800 euros à la Ville de Rezé au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

Un intérêt local reconnu

Bien que l’arrêté ait été suspendu, le juge des référés relève que :  

Comme le fait valoir la commune de Rezé et ainsi que cela ressort des motifs de la délibération attaquée, la problématique de l’utilisation des produits phytopharmaceutiques ne concerne pas exclusivement les communes rurales mais aussi les communes urbaines, dans la mesure où, dans certaines zones de leur territoire, l’usage de ces produits reste autorisé. Dès lors, la délibération litigieuse n’est pas dépourvue de tout intérêt local. 

Pour une commune urbaine comme Rezé, cette insertion reconnaît explicitement un intérêt local à se saisir de l’enjeu des produits phytosanitaires.

Rezé fait déjà en matière de pesticides

La Ville poursuit son engagement en faveur de la transition écologique et de la santé environnementale en cohérence avec deux Agendas 21 de 2007 et 2011 et un plan d’actions en faveur de la transition écologique, « La Fabrique rezéenne des transitions », adopté en conseil municipal le 30 septembre 2016.

La Ville de Rezé a mis en place, dès 2003, des pratiques plus respectueuses de l’environnement afin de se passer des produits phytosanitaires chimiques de synthèse sur les espaces verts dont elle a la charge. Parmi ces pratiques, on peut citer le paillage des sols, l’usage d’engrais organique, le binage manuel, le désherbage thermique et l’utilisation de produits dits de « biocontrôle ».

Ces techniques mobilisent beaucoup plus en temps les agents municipaux et métropolitains en charge de l’entretien des espaces verts et des rues, mais la Ville de Rezé a fait le choix de prioriser les enjeux de santé des agents et des habitants, tout comme la préservation de la biodiversité.