Les seniors et la crise sanitaire

Près d’un quart de la population rezéenne a plus de 60 ans. Du jeune retraité actif à la personne très âgée et fragile, tous sont confrontés à la crise sanitaire et ont modifié leurs habitudes. La Covid-19 fait partie de leur quotidien.

Regards croisés d’aides à domicile

Isabelle Boinot et Catherine Lemoine font partie du service d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD) de la Ville. Elles interviennent auprès des seniors de plus de 60 ans ou en situation de handicap pour différentes prestations : ménage, repassage, entretien du linge, aide aux courses, préparation et aide à la prise de repas, accompagnement à un rendez-vous ou pour une promenade, aide à la personne (lever, toilette partielle, habillage), soutien à l’aidant.

Comment vont les seniors ?

Catherine Lemoine :  Beaucoup de seniors ont réduit leur déplacement par peur d’attraper la Covid-19. Ils restent chez eux, ont moins d’activités physiques, s’ennuient. Certains n’ont plus envie de cuisiner. Beaucoup n’ont pas le moral.
Isabelle Boinot : Ils ont moins de visites et voient beaucoup moins leur famille à cause du couvre-feu. Cela pèse évidemment. Mais étonnamment, ils réagissent parfois mieux que nous, car plus habitués à être isolés.

Votre métier a-t-il changé avec la crise sanitaire ?

Catherine Lemoine : Les seniors ont davantage besoin d’être soutenus. Quand ça ne va pas, j’essaye de leur remonter le moral. Je leur propose de cuisiner ensemble par exemple. Ça leur fait du bien. Ils se posent beaucoup de questions. Je leur apporte des informations.
Isabelle Boinot : Les seniors ont davantage besoin de nous pour le relationnel que pour les tâches techniques à proprement parlé. Nous sommes parfois leur seul lien avec l’extérieur de la journée. Je prends davantage le temps de discuter avec eux.

La crise sanitaire durement ressentie par les plus âgés

La crise de la Covid-19 a été durement ressentie par les plus âgés : le confinement et la distanciation physique ont entraîné une augmentation des situations de perte d’autonomie.

Le Clic (Centre local d’information et de coordination gérontologique) a assuré pendant le confinement un suivi à distance et, dès que cela fut possible, des évaluations Carsat (Caisse d’assurance retraite et de la santé au travail) à distance.

Mais les premières semaines suivant le déconfinement ont entraîné une surcharge d’activité significative entre le 1er juin et le 31 août :

  • 104 personnes aidées pour la première fois (68 en 2019 pour la même période)
  • 400 personnes aidées (288 en 2019)
  • 1 670 entretiens (1 012 en 2019)
  • 132 visites à domicile (115 en 2019).

La Ville de Rezé s’est mobilisée auprès des personnes âgées dès le début de la crise sanitaire. La nouvelle équipe municipale arrivée au mois de juillet dernier a poursuivi et développé ses efforts en direction des seniors pour leur permettre de traverser cette période le mieux possible. Pour cela, le service seniors s’est organisé pour garder le contact avec les personnes les plus isolées soit par téléphone ou en présence via les équipes du service d’aide et d’accompagnement à domicile (SAAD) et du service de soins infirmiers à domicile (SSIAD).

Nous aidons également les seniors de plus de 75 ans qui seraient en difficulté pour se rendre dans un centre de vaccination avec la mise en place de transport via le service mobilité de la Ville. Une cellule d’écoute a également été installée pour répondre aux questions et aux inquiétudes des personnes âgées. Nous adaptons les dispositifs d’accompagnement en fonction des consignes sanitaires en restant au plus près des besoins des seniors en partenariat avec les associations et les professionnels.

Philippe Audubert, adjoint au maire en charge des personnes âgées et de la santé

Comment les seniors vivent-ils la crise sanitaire ?

Le plus dur pour moi et mon mari de 86 ans, c’est de ne plus voir nos enfants et petits-enfants comme avant. Ils veulent nous protéger. Donc on ne se voit plus que de temps en temps, toujours masqués. Par contre, on s’envoie beaucoup de messages via l’application WhatsApp. Des fois avec la caméra, mais j’ai du mal à la lancer toute seule !
Nous avons aussi changé nos habitudes. On fait nos courses dans les grands magasins tous les quinze jours pour éviter la foule. On ne va plus à l’église tous les dimanches. On évite de se voir avec la famille et les amis : on se téléphone ! Nous continuons à échanger avec nos voisins, mais de loin : on garde nos distances. Le pique-nique organisé tous les ans a été annulé. Tout comme les sorties et les activités en groupe auxquelles nous participions avant.
On ne se sent pas isolés : l’association Rezé Seniors nous appelle toutes les semaines pour savoir si ça va.
Je garde ma bonne humeur pour mieux vivre cette période particulière. Et j’arrive toujours à faire rire les autres ! En 2021, nous célébrons nos 50 ans de mariage avec mon mari. On espère pouvoir les fêter avec nos enfants et petits-enfants.

J’ai peur du virus. Je ne vais plus dans les magasins. Je ne sors plus que pour récupérer mes courses au drive, aller chez ma kiné, à la pharmacie ou promener mon chien. Grâce à lui, je marche trois heures tous les jours !
Je n’ai pas de famille ici. Ma fille et mes deux petites-filles habitent à Toulouse. J’attends d’être vaccinée pour aller les voir. Mais je ne fais pas partie de la tranche d’âge prioritaire. La vaccination est mon seul espoir pour pouvoir voyager à nouveau. Les délais sont trop longs.
En attendant, je ne reçois plus personne chez moi. Sauf l’aide à domicile toutes les semaines. Je suis contente de voir quelqu’un même si je prends de nombreuses précautions. La plupart de mes amis sont plus âgés que moi. Je ne veux pas leur faire courir un risque et préfère leur téléphoner. Je garde aussi le contact avec mes voisins avec qui je discute quand je promène mon chien. Je me suis trouvée des occupations : je regarde des séries, des jeux télévisés, je lis beaucoup. Je ne pensais pas que cette période durerait aussi longtemps. Toutes les contraintes liées au contexte sanitaire pèsent lourd. Je fais régulièrement des crises d’angoisse, notamment le weekend. J’ai hâte que l’on sorte de tout cela.

Avec ma femme qui a 86 ans, nous faisons partie des chanceux. D’une part, d’être à deux et en bonne santé. D’autre part, d’habiter dans un appartement situé au rez-de-chaussée avec un petit espace vert. Ainsi, nous prenons l’air quand nous en avons envie. Et notre fille habite dans un logement, au-dessus du nôtre. Dès le moindre problème, nous savons qu’elle n’est pas loin et qu’elle peut intervenir. Tout cela réuni nous permet de bien supporter l’enfermement que nous vivons actuellement. Pour nous protéger, nous sortons le moins possible : tous les mardis pour faire nos courses quand il y a moins de monde, et au parc de Praud pour marcher un peu. Chaque semaine, nous avons la visite d’une aide à domicile qui donne un coup de fraîcheur à l’appartement et à nous aussi ! Nous n’avons pas modifié nos activités : lecture, jeux, marche. Nous avons reçu notre première dose de vaccin. Nous aurons la deuxième dans 15 jours. La situation sera plus confortable mais nous resterons prudents pendant un moment encore. Nous nous autoriserons peut-être quelques sorties en magasins. Mais ce n’est pas encore demain que nous pourrons aller danser !

Initiative

Rezé Seniors en lien avec ses adhérents

Confinés, mais pas isolés ! Durant les 56 jours du 1er confinement, les adhérents de Rezé Seniors ont reçu chaque jour – même le week-end – un courriel.
« Avec des informations pratiques pour les aider à y voir plus clair dans les mesures en vigueur, explique Muriel Jouanneaux, assistante de l’association. Mais surtout des suggestions d’activités: des jeux de mémoire, des recettes de cuisine, des exercices de sport, des photos, des liens vers des reportages, des musiques, des pièces de théâtre, des dessins humoristiques… »

Une initiative très appréciée par les 800 destinataires. « Nous avons reçu de nombreux remerciements. Pour beaucoup, cela a permis d’adoucir ce confinement. Certains adhérents se
sont pris au jeu en nous transmettant régulièrement des propositions d’activités. » 150 adhérents non connectés à l’informatique étaient, quant à eux, appelés une fois par semaine par l’association. En fin d’année, le dispositif a été sélectionné par la Carsat Pays de la Loire en tant que « projet innovant fait avec et pour les seniors ».

À la clé : 4 000 euros que l’association souhaite utiliser pour prolonger le projet au moins jusqu’à l’été. Depuis le deuxième confinement, trois courriels sont envoyés chaque semaine aux adhérents et les appels aux seniors non connectés ont repris. « Rezé Seniors va reprendre des activités en extérieur tant que les ateliers habituels ne pourront se dérouler », conclut Gérard Aigroz, président de l’association. Autre bonne nouvelle : des visites individuelles à domicile pour les bénéficiaires des ateliers Liens croisés, mises en place depuis décembre.

INFOS – 02 51 72 71 27, rezeseniors.fr